« Je ne fais confiance à aucun pays qui regarde un continent et dit :
« Hé, je prends la partie gelée. »
– Jon Stewart
Residents of Québec City enjoy some wintertime fun on the shores of the St. Lawrence River
Les joueurs de l’équipe de hockey de Simcoe, gagnants du championnat de la Lacrosse Hockey League, prennent la pose pour une photo d’équipe en 1899.
Cree children attend All Saints Residential School in Treaty 6 Territory, La Ronge, Saskatchewan. The Canadian government’s residential school program, supported by all major churches in Canada, aimed to destroy cultural ties and forcibly assimilate Indigenous children into the Canadian mainstream.
A steam-powered snowplow clears train tracks outside Saint-Agapit, Québec.
Fishermen in Lockeport, Nova Scotia, admire their haul: two 650-pound tuna.
Quand on s’arrête pour y penser, on se dit sans doute que la cuisine à l’époque de la Confédération était insipide et aucunement aussi variée que celle d’aujourd’hui. Les hivers étaient longs et la livraison de fruits frais à l’année relevait de l’utopie. Personne n’aurait pu imaginer manger des fraises en janvier (sauf celles qu’on avait mises en conserve soi-même).
Cela étant dit, la cuisine hivernale canadienne n’était pas totalement dépourvue de variété, et nombre de ses plats ressemblent étrangement à la cuisine réconfortante qui refait aujourd’hui son apparition dans les restaurants. Les féculents tels que les pommes de terre et les courges étaient à la base de notre alimentation, comme ils l’avaient été pendant des siècles pour les peuples autochtones, avant l’arrivée des Européens. Les légumineuses séchées et la viande salaisonnée venaient ajouter une bonne dose de protéines à ce régime alimentaire, parfois dans le même plat, comme dans la soupe aux pois et au jambon. Bien entendu, la tourtière tire ses origines de la colonisation française. Le pemmican dans les Prairies, la morue salée sur la côte Est et le saumon fumé dans l’Ouest aidaient les familles à traverser l’hiver. La banique, un hybride entre des ingrédients écossais et un savoir-faire autochtone, s’est répandu jusqu’à l’océan Arctique. Un peu partout au pays, le dessert consistait en une variation sur le thème de la cassonade, du sirop d’érable ou de la mélasse.
Aujourd’hui, les plats réconfortants d’hiver de la grande majorité des Canadiens qui vivent dans les villes ou villages, que ce soit le chili aux poivrons colorés et au maïs frais, le riz garni d’oignons verts et de bok choy ou encore les hamburgers garnis de fromage de chèvre et de roquette biologique, paraîtraient plutôt étranges aux Canadiens d’autrefois.
De la raquette au curling en passant par la planche à neige, les sports d’hiver aident les Canadiens à apprécier la saison froide (ou du moins à prévenir le sentiment d’enfermement).
Depuis que le Canada a été fondé, il y a 150 ans, le hockey domine les sports d’hiver. Il s’agit du seul sport immortalisé sur notre monnaie, et de la seule raison de mettre le pays sur pause quand une médaille d’or est en jeu.
Mais récemment, de moins en moins de jeunes traînent leurs parents à l’aréna le samedi matin à 5 h en plein milieu du mois de janvier.
Alors que la pratique du hockey chez les jeunes est en chute et que les cotes d’écoute à la télévision stagnent (même si le Canada continue à produire le plus grand nombre de joueurs, et les meilleurs), l’attention des Canadiens empreints de la lassitude hivernale commence à se tourner vers un autre sport aux origines canadiennes.
C’est peut-être James Naismith, natif d’Almonte, en Ontario, qui a inventé le basketball, mais le premier siècle de l’histoire de ce sport n’a pas été marqué par un grand intérêt de la part des Canadiens. Les Huskies de Toronto, une équipe formée précipitamment par un cadre de la Ligue nationale de hockey qui y voit une occasion de remplir les arénas vides durant la saison morte, jouent une saison professionnelle en 1946–47 avant d’être démantelés. C’est seulement après l’obtention d’une franchise de la National Basketball Association par Toronto et Vancouver, dans les années 1990, que le basketball se met à attirer les foules, lentement mais sûrement. Les Grizzlies de Vancouver traversent six saisons de peine et de misère, puis ils quittent la ville canadienne pour s’installer dans l’herbe légèrement plus verte de Memphis. Les Raptors de Toronto connaissent des débuts difficiles, car il s’agit de la quatrième équipe de la ville, loin derrière les Maple Leafs, les Blue Jays (qui viennent de remporter deux victoires en Série mondiale) et même les Argonauts.
Puis, en 1998, Vince Carter arrive en ville. Grâce à son penchant pour les lancés coulés violents et ses partenaires qui s’améliorent de jour en jour, celui qu’on nomme « Vinsanity » se met à électrifier les foules du Centre Air Canada, alors que l’équipe qui joue sous le même toit, les Maple Leafs, commence une autre décennie de désespoir. Quelques années plus tard, Steve Nash, un jeune homme de petite stature (selon les normes du basketball) aux cheveux longs, originaire de Victoria (C.-B.), enflamme la NBA. Il remporte consécutivement deux prix du joueur le plus utile et fracasse de nombreux records, tout en accumulant des points pour la statistique la plus canadienne qui soit : les aides.
Pour la première fois, des jeunes de St. John’s à Surrey jouent non seulement au basketball au parc, ils peuvent maintenant consacrer leur vie à ce sport. Le hockey, avec son conformisme rigide, son coût de départ élevé, son jeu physique menant à des punitions et sa courbe d’apprentissage aussi abrupte que le mont Everest, est pour la première fois en train d’être supplanté par un sport qui lui est diamétralement opposé. Le basketball encourage l’individualité et la personnalité (jusqu’à un certain point), l’équipement requis se résume à des chaussures, des shorts et un ballon, et sa grande popularité internationale rassemble les enfants d’immigrants des quatre coins du monde, pour qui le hockey est un concept aussi abstrait que les pneus d’hiver.
Après quelques soubresauts, les Raptors deviennent donc la nouvelle coqueluche de la métropole ontarienne. Le basketball est en pleine effervescence au niveau universitaire et professionnel. En 2015, l’équipe nationale féminine, dirigée par Kia Nurse, rafle l’or à domicile aux Jeux panaméricains. D’ici un an ou deux, l’équipe masculine, plus débordante de talent que jamais, pourrait même obtenir une médaille aux Olympiques. Dans les dernières années, les équipes de la NBA ont repêché de nombreux jeunes Canadiens talentueux tels que Tristan Thompson, Andrew Wiggins, Kelly Olynyk et Cory Joseph, qui citent presque tous Carter ou Nash comme inspiration. L’été, les terrains extérieurs sont pleins à craquer et les paniers dans les ruelles sont pratiquement aussi répandus que les filets de hockey. L’hiver, il est presque aussi difficile de réserver une plage horaire dans un gymnase que du temps de glace à l’aréna.
Deux scènes vécues en 2016 sur la même parcelle de terrain de Toronto illustrent bien cette transformation. Les Raptors amorcent la plus longue série éliminatoire de leur histoire et se rendent en finale de Conférence. À l’extérieur du Centre Air Canada, une foule de milliers de partisans – composée surtout des jeunes et représentative de la diversité vertigineuse de la métropole – prend d’assaut le Maple Leaf Square, qui rappelle tout à coup le Parc jurassique. La population de la ville et d’une bonne partie du pays est rivée à l’écran à chaque lancer franc, à chaque tir à trois points, et à chaque interaction sublime entre les étoiles DeMar DeRozan et Kyle Lowry, même lorsque LeBron James indique clairement que les Raps ne se rendront pas en finale. De toute l’histoire du sport canadien, jamais une équipe n’aura eu la tête aussi haute lors d’une défaite en séries éliminatoires!
En contraste, quelques mois plus tard se tient à Toronto la première Coupe du monde de hockey sur glace. Les billets au prix exorbitant sont plus difficiles à vendre que prévu. On peut se procurer des billets pour la modique somme de 25 $ en revente pour assister aux premiers matchs de finale, et les rangées vides font couler autant d’encre que le jeu en soi. Sans grande surprise, Équipe Canada accumule les victoires, dérobant ainsi le tournoi de toute émotion forte. Et les partisans ne sont pas dupes. De retour au Maple Leaf Square, une équipe de tournage demande à la douzaine de partisans de se masser devant les caméras par cette belle journée de septembre où ils sont venus assister gratuitement au match, afin de créer l’illusion d’une foule. S’il y avait eu des mouches au centre-ville de Toronto ce jour-là, on les aurait entendues voler.
Après 150 ans, le hockey canadien est loin d’être mourant. Chaque week-end, des millions de personnes regardent encore la Soirée du hockey et, bien que le nombre de jeunes qui choisissent ce sport soit en déclin, le calibre du jeu au pays augmente de manière constante depuis quelques décennies. Mais pendant nos longs et froids hivers, ce n’est plus le seul sport accessible.
LES TÊTES FROIDES DOMINENT
Les stéréotypes – même ceux qui semblent positifs – sont parfois une arme à double tranchant. Pour chaque personne qui croit que les Canadiens sont polis et qu’ils ont bon caractère, une autre affirme que ces qualités n’en sont pas et qu’il s’agit plutôt de défauts : nous sommes trop polis, trop ennuyeux et trop naïfs. Dans le feu de l’action, nous savons pourtant garder la tête froide, et c’est là une qualité qui peut mener à de grandes choses.
Les boîtes à oeufs
Les Canadiens ne font pas que résoudre des conflits internationaux, ils trouvent aussi des solutions aux problèmes nationaux. En 1911, l’éditeur de journal britanno-colombien Joseph Coyle entend un fermier se disputer avec un propriétaire d’hôtel au sujet des œufs qui lui sont trop souvent livrés cassés. Pour résoudre le problème et régler la dispute, Coyle invente une boîte à œufs, une invention si simple et si brillante qu’elle n’a pas vraiment été améliorée depuis plus d’un siècle. S’il est vrai qu’il ne faut pas mettre tous ses œufs dans le même panier, pourrait-on plutôt les mettre bien en sécurité dans la même boîte?
Maintien de la paix
Pendant la crise du canal de Suez en 1956, le Canada, contrairement au Royaume-Uni, prend du recul et cherche des solutions rationnelles à la situation en Égypte. Dirigée par Lester B. Pearson, diplomate à l’époque (il deviendra ensuite le premier ministre qui abolira la peine de mort et gardera le pays à l’écart de la guerre du Vietnam), la première Force d’urgence des Nations Unies voit le jour. Sa contribution au cessez-le-feu vaut à Pearson un prix Nobel de la paix. Nous sommes souvent critiqués pour la petite taille de nos forces militaires, mais a-t-on besoin d’une armée quand on est un des pays les plus reconnus pour le maintien de la paix? Voici une réputation qu’il vaut la peine de conserver.
Les fuseaux horaires
Après avoir manqué son train en raison d’une erreur d’impression sur l’horaire, Sir Sandford Fleming ne se fâche pas. Il se tourne plutôt vers la science. Les horaires de train lui donnent l’idée d’un système universel de 24 heures et, en 1879, il propose les fuseaux horaires au Royal Canadian Institute. Fleming continue de faire la promotion de son idée dans le cadre d’importantes conférences et, en 1929, presque tous les grands pays ont adopté les fuseaux horaires. Grâce à Fleming, si vous manquez le train aujourd’hui, vous en êtes le seul responsable.
Quelques Arpents de Pièges
Petite question : que se passe-t-il quand vous vous apprêtez à jouer à votre jeu de société favori et que vous vous rendez compte qu’il vous manque des pièces? Est-ce que vous : a) cherchez à travers les coussins du sofa en enfilant les jurons? b) examinez votre animal domestique pour voir s’il les a avalées? c) vous effondrez en pleurant? Chris Haney et Scott Abbot se sont plutôt retroussé les manches et ils ont créé leur propre jeu. C’est ainsi que quelques lettres de Scrabble manquantes et deux têtes froides ont donné lieu au jeu canadien le plus intellectuel : Quelques Arpents de Pièges.